Il baissa le regard, ne voulant pas craquer et pourtant il sait qu'il est déjà trop tard, il vient de signer son arrêt de mort, mais ne fait rien pour se dégager. Et son frère profite de ce signe de faiblesse pour se montrer plus entreprenant. Il sent ses lèvres se poser dans son cou et sa main se faufiler dans son caleçon, à un endroit où il en est sûr la main de son frère ne devrait pas se trouver. Son esprit est contradictoire, sa tête combat ses hormones qui souhaitent que ce moment dure des heures. Puis sa raison se réveille et reprend le dessus. C'est tellement dégoutant et immorale. Il se laisse toucher par un autre garçon, par son propre frère. Il n'est pas comme son frère, il n'est pas une taffiole se faisant baiser par tout ce qui bouge. Un mot apparait soudain dans son esprit, inceste. Voilà ce que c'est. Le plaisir qui le submerge à le goût d'interdit, le goût de la honte. Le dégout laisse son empreinte brulante dans sa chair. Surtout qu'il se promet que ce n'était qu'une erreur, qu'un moment de faiblesse qui ne se reproduira plus jamais, mais il cède à chaque fois, incapable de résister à ses moments d'interdit. Il est à chaque fois plus horrifié, se demandant comment il en est arrivé là, pourquoi son frère fait cela...
Il se met à le fuir, à l'éviter le plus possible, ce n'est guère compliqué au début, car en tant que petit nouveau dans la police il a droit aux horaires merdiques, aux planques pourries, et aux rondes qui durent toute la nuit. Les rares fois où ils se voient il prend garde à ne jamais être seul avec lui et prend le large des que les choses prennent une pente glissante. Puis il y a eu cette veillée funèbre. Son frère avait commencé à l'emmerder et il s'était apprêter à l'envoyer bouler quand celui-ci lui avait montré ce qu'il était trouvé sur son ordinateur. Autrement dit, rien d'autre que des photos le montrant en train de tabasser un type à mort. Il s'était résolu à laisser couler pour cette fois, voulant avoir le temps de se préparer à l'affronter plus tad. Parce qu'il était hors de question que tout recommence comme avant.


« Bon alors aujourd'hui, on va faire une course d'orientation. Vous avez une carte et une boussole, à vous de vous débrouillez avec ! La première équipe arrivée gagne, c’est aussi simple que cela ! » Leur instructeur leur jeta un regard blasé, vérifiant qu’ils avaient bien compris la consigne, parce qu’évidemment à chaque fois il y avait toujours des boulets pour ne pas comprendre des instructions aussi basiques. Jamie se contenta de hocher la tête, avant de reporter son attention sur les deux coéquipiers qu’on lui avait attribués. Il les détailla un instant poussant un soupir fataliste, avant de conclure qu’il n’y avait aucune chance qu’il finisse premier avec les bras cassés qu’on lui avait refilé. Entre la bimbo blonde à côté de la plaque et l’espace de crétin asthmatique, allergique à presque tout ce qui pouvait exister il ne se faisait pas d’illusion. Il leur jeta un regard méprisant alors qu’ils s’entêtaient à essayer de comprendre où ils se trouvaient sur la carte et où ils devaient aller. « Bon, alors voyons voir, je dois être là... Heu à moins que je ne sois ici. Voyons voir le nord doit être par là ; à moins que ce ne soit le sud. Bordel, dans quel sens je suis censée tenir cette maudite carte ! » Il leva les yeux au ciel, préférant garder le silence au risque de se montrer totalement odieux et infect. Il détestait briser le parfait masque qu’il s’était créé, mais malheureusement rien ne l’exaspérait plus au monde que de se voir ralenti par des personnes inutiles et sans avenir, des futurs assistés. Il ne comprenait absolument pas ce qu’ils faisaient là. Comment pouvaient-ils croire avoir la moindre chance ? Le mince contrôle qu’il avait sur son sang froid vola en éclat après que la cruche blonde est déchirée la carte en deux et il s’approcha d’elle à grand pas, récupérant les lambeaux de carte sans aucune douceur. « D’habitude je joue le type sympathique en n’importe quel circonstance, mais je n’ai pas de temps à perdre avec des gens qui ne seront de toute façon plus là dans deux jours, alors autant en clair je prends le matériel et je fais la course pendant que vous vous déclarez forfait ! » Fini le garçon toujours poli et charmant qu’il prétendait être. « Hé, je n'ai aucun sens de l'orientation alors si on me donne une boussole et une carte, il faut aussi me donner des fusées de détresse. » « Le problème c’est que les gens comme vous auront besoin de fusée de détresse toute leur vie ! » Il tourna les talons sans un seul regard en arrière, et sans ressentir une once de remord. Non, il n'était pas entil et oui, le reste du temps il se contentait de le prétendre. Parce qu'il fallait l'avouer, les gens étaient vachement moins chiants quand on les prenait pour des cons en jouant les bons samaritains.

C'était son premier jour depuis qu'il était sorti de l'académie et il se dirigeait vers le coéquipier qu'on lui avait assigné. « C'est vous qui allez... » « Je t'arrête tout de suite le bleu. Je bosse seul. Je n'aime vraiment pas devoir me trainer un boulet. Alors si t'as besoin d'une nounou trouves-toi un autre pigeon ! » Jamie le fixa avec agacement, pas surpris pour un sou par sa réaction. On l'avait prévenu que ce ne serait pas facile, qu’il aurait à un vieux loup habitué à bosser seul et pouvant parfois agir de façon musclé. On l’avait prévenu qu'il lui faudrait beaucoup de persévérance pour arriver à se faire accepter par son partenaire, mais que s'il y arrivait il ne perdrait pas au change. Apparemment, son futur partenaire était –malgré pas mal de dérapages- une vraie légende. Et étant donné qu'il voulait apprendre avec les meilleurs, il était hors de question qu'il lui laisse le moindre répit avant qu'il ne cède. « Je vais mettre les choses au clair tout de suite, quoi que vous fassiez je travaillerais avec vous, alors vous avez intérêt à vous faire à l'idée dès maintenant. » L'autre agent lui avait enfin accordé un peu d'attention, la gratifiant d'un sourire en coin tout en le dévisageant. « Je t'aime bien gamin. Le dernier qu'ils m'ont envoyé n'a pas tenu plus longtemps qu'une journée. Voyons voir si t’as plus de couille que lui et si tu vaux la peine que je te forme. » Jamie lui avait envoyé un sourire moqueur, impatient de pouvoir l'impressionner. Si l'autre croyait qu'il allait baisser les bras, il rêvait éveillé. Il allait lui montrait ce qu’il avait dans le ventre, et tellement l’épater qu’il ne le traiterait plu de gamin sans y réfléchir à deux fois.
Et il avait réussi à montrer ce qu'il avait dans le ventre. Pas une seule seconde il ne s'était plaint, même pas quand il le testait de façon assez rude. Pourtant, il lui en avait fait baver, mais il s'était accroché et avait su gagné son respect. Cela n'avait pas été une partie de plaisir, mais il savait à quoi s'attendre et était incroyable motivé. « Tu caches bien ton jeu derrière ce visage d'ange impassible. Il semblerait qu'on se ressemble bien plus que je ne le croyais. » Et effectivement, Jamie avait à plusieurs reprises prouver que derrière son calme olympien se cachait quelqu'un à fleur de peau. Bien loin du jeune bien élevé qu'il était, il était en fait un caractériel prêt à user de violence si on le provoquait, et plus le temps passait et plus le contrôle qu'il avait sur son agressivité s'effriter. Autant dire que le fait que son mentor et coéquipier l'encourage à agir de cette manière n'aidait pas à le canaliser.


« Arête, bon sang arrête, t’es en train de le tuer. » Jamie leva les yeux du corps méconnaissables grâce à ses bons soins, corps qui avait cessé de bouger depuis un certain temps. Contemplant un instant ses mains couvertes de sang, il eut un rictus moqueur avant de prendre un ton dur et implacable. « Ne joue pas les chochottes Clay, tu savais parfaitement à quoi t'attendre. Ton apitoiement est ridicule. Je n'ai pas le temps de jouer la nounou pour toi. » Jamie était furieux, furieux de voir qu'il se montrait si faible. Ils étaient là pour faire justice à celui qui les avaient formés, celui qui était son coéquipier, celui était maintenant à l’hôpital parce qu’il avait reçu une balle. Le petit merdeux qui était à terre avait cru sans sortir à bon compte, mais c’était sans compter Jamie qui refusait que rien ne soit fait. Puisque la justice ne pouvait agir, il avait décidé de faire justice lui-même. Qui pourrait le soupçonner ? Ses états de service étaient irréprochables et il passait en dehors pour être un type sans histoire. Le seul qui saurait ce qui s'était passé était celui qui était maintenant avec lui, mais il ne dirait rien puisqu'il était son complice et, son mentor et coéquipier qui ne dirait rien car il aurait agi lui aussi exactement ainsi. Il l'avait frappé une derrière fois avant de retourner vers la voiture, attendant que son coéquipier monte pour démarrer. Plus tard, il avait appris que celui qu'il avait tabassé avait succombé de ses blessures et que la police n'avait pas le moindre ombre de piste. Le contraire aurait été étonnant, puisque la police s'était lui.


«Je... écoute, ce n'est pas... » Il soupira, assez mal à l'aise. Qu'était-il censé dire ? Il savait ce qu'il avait envie de lui dire, mais le tout était de le faire avec tact. Il était censé être un type bien et les types bien faisaient les choses avec subtilité et égard. « Je croyais que je te plaisais ! » A vrai dire lui aussi, mais il fallait bien admettre qu'embrasser son traversin lui aurait certainement fait le même effet. Ca y est le moment qu'il redoutait était arrivé, son frère avait fini par le bousiller. Il ne ressentait absolument rien alors que tous ses collègues avaient bavés sur elle. Mais dès qu'elle avait eu le malheur de lui dire de l'appeler Sammy, il avait bondi du canapé et mit le plus de distance entre eux. Il avait eu après cela un blanc et finalement il en était là, à essayer de trouver une excuse pour s'enfuir. Il marmonna qu'il ne se sentait pas vraiment bien, qu'une blessure qu'il s'était fait en service le faisait souffrir. Après cela, il avait tenté de calmer les battements affolés de son cœur et l'étourdissement qui l'avait saisi. Arrivé chez lui, il avait filé dans sa chambre -où il s'était enfermé à double tour- sans un regard pour personne et encore moins pour Sammy. Là il avait pris sa décision. Puisque son frère voulait jouer, il allait entrer dans son jeu. Mais cette fois cela allait se passer selon ses règles et autant dire que Sammy allait vite comprendre qui commandait. Il allait lui montrer le vrai Jamie et Sammy allait devoir comprendre que ce n'était plus lui qui dictait les règles du jeu.